La goûteuse d' Hitler de Rosella Postorino

Un livre de la bibli de V.le C..

Rosella POSTORINO :
 
Née à Reggio de Calabre en 1978, elle a grandi à San Lorenzo al Mare, en Ligurie.
Premier livre de Rosella Postorino traduit en français, "Le assaggiatrici" ("Les goûteuses") est sorti en 2018 en Italie où il a rencontré un énorme succès critique et populaire, remportant de nombreux prix dont le prestigieux prix Campiello.
Prix des lecteurs Livre de Poche 2020. 
La traduction française de son roman  (D. Vittoz) a remporté le 25e Prix Jean Monnet lors du Littératures Européennes Cognac Festival 2019.
 
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Base historique :
 
Margot Woelk (ou Wölk) (27 décembre 1917 - 2014) était une des goûteuses d'Adolf Hitler. Elle faisait partie d'un groupe de quinze jeunes femmes qui, en 1942, ont dû tester la nourriture d'Hitler à  la Wolfsschanze ("tanière du loup") pour s'assurer qu'elle n'était pas empoisonnée. 
Margot Woelk sera la seule survivante de ce groupe et ne témoignera de cet épisode de sa vie que deux ans avant sa mort, soixante-dix ans après les faits.
 
Selon un article de Sven Felix Kellerhoff dans Die Welt, Hitler n'avait pas de goûteur personnel. Cependant, Margot Woelk ne prétend pas avoir été à la Wolfsschanze. Le test préliminaire avait lieu en dehors. Vraisemblablement, seuls des échantillons de livraisons de nourriture étaient goûtés.

L'historien Arnd Bauerkämper lui, confirme qu'Hitler a utilisé des goûteurs parce qu'il avait peur d'être assassiné. Il avait son cuisinier personnel. 
 
En 1944, les services secrets britanniques ont abandonné le plan d'empoisonner la nourriture du dictateur parce qu'on soupçonnait qu'il utilisait des goûteurs.
 
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Ce livre est un roman.      
 
 
4ème de couverture :
 
1943. 
Reclus dans son quartier général en Prusse orientale (Pologne), terrorisé à l’idée que l’on attente à sa vie, Hitler a fait recruter des goûteuses. 
Parmi elles, Rosa. Quand les S.S. lui ordonnent de porter une cuillerée à sa bouche, Rosa s’exécute, la peur au ventre : chaque bouchée est peut-être la dernière. 
Mais elle doit affronter une autre guerre entre les murs de ce réfectoire : considérée comme « l’étrangère », Rosa, qui vient de Berlin, est en butte à l’hostilité de ses compagnes, dont Elfriede, personnalité aussi charismatique qu’autoritaire. 
Pourtant, la réalité est la même pour toutes : consentir à leur rôle, c’est à la fois vouloir survivre et accepter l’idée de mourir.
 
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Rosella Postorino :
 
« Dès que j’ai posé les yeux sur cette histoire, j’ai été foudroyée, raconte Rosella Postorino. La vie de Margot Wölk était remplie de contradictions. Elle ne croyait ni en Hitler ni au régime nazi, pourtant elle a risqué sa vie pour eux. Elle était également privilégiée, puisqu’elle pouvait manger trois fois par jour alors que le reste de la population mourait de faim. Elle était à la fois victime et complice. 
Mais devient-on implicitement coupable dès lors qu’on est inapte ou qu’on refuse d’agir ? « C’est une faute métaphysique, celle de rester vivant tandis que les uns et les autres succombent ou vivent des injustices. Ça ne concerne pas uniquement les gens qui ont vécu la Deuxième Guerre mondiale ou un régime dictatorial. »
 
Ce livre n'est pas un roman biographique et, s'il fait référence à de nombreux événements réels et s'appuie sur une documentation sérieuse et précise, il s'avère un roman au cadre certes historique mais de très libre facture.
Rosella Postorino imagine en grande partie son héroïne narratrice, jeune Allemande issue d'une famille non nazie qui a dû s'adapter pour survivre, et elle se glisse dans son corps et son esprit, au plus près de ses sensations et de ses émotions, de ses réflexions et de ses interrogations...
 
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EXTRAITS :
 
"Le repas terminé, deux SS se sont approchés et la femme à ma gauche s’est levée.

« On ne bouge pas ! Rassieds-toi ! »
Elle s’est laissée retomber comme s’ils lui avaient donné une bourrade. Une de ses tresses roulées en macaron s’est échappée de son épingle dans un léger balancement.
« Vous n’avez pas le droit de vous lever. Vous resterez ici, à table, jusqu’à nouvel ordre. En silence. Si les plats sont empoisonnés, l’effet sera rapide. » Le SS nous a dévisagées une à une, guettant nos réactions. Personne n’a bronché. Puis il s’est adressé de nouveau à celle qui s’était levée : elle portait le Dirndl traditionnel et avait peut-être voulu manifester sa déférence. « C’est l’affaire d’une heure, rassure-toi. Dans une heure, vous serez libres.
– Ou mortes », a souligné un de leurs hommes."

 
-  "On s'habitue aux sirènes, à dormir tout habillé pour se précipiter au refuge, quand elles retentissent, on s'habitue à la faim, à la soif. Je m'étais habituée à être payée pour manger. Ce qui pouvait sembler être un privilège était un travail comme un autre."
 
-  "Ma colère contre Hitler était personnelle. Il m' avait privée de mon mari et chaque jour je risquais ma vie pour lui. Mon existence était entre ses mains, voilà ce que je détestais. Hitler me nourrissait, et cette nourriture pouvait me tuer.
 
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Dépassant les alibis faciles qu'on se donne pour évacuer sa responsabilité," La goûteuse d'Hitler" interroge ainsi chacun très concrètement sur sa capacité d'adaptation pour survivre, sur son refus de voir et de savoir, sur sa capacité de tolérance de l'horreur.
 Avec finesse et malice, profondeur et sensibilité, Rosella Postorino y montre la fragilité des frontières entre douceur et violence, amour ou haine. Entre la main qui caresse et celle qui tue, la bouche qui embrasse et celle qui mord. 
Et elle vient ainsi judicieusement nous rappeler que les "monstres" sont bien des hommes.
 
Complément :
 

lecture adulte

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